« Une société porte son art comme l’arbre ses fleurs, en raison de leur enracinement dans un monde que ni l’un ni l’autre ne prétend faire totalement sien ».
Claude Lévi-Stauss, Anthropologie structurale deux.
Si la performance artistique est un héritage des futuristes, des dadaïstes et des surréalistes, puis du happening et du collectif Fluxus, elle est aujourd’hui partie intégrante de la création contemporaine. Elle poursuit son but initial : gommer le plus possible la limite qui sépare le public et son quotidien, de l’artiste et son corps en pleine action, tout en utilisant l’interaction.
C’est ce qu’Audrey Phibel se fixe pour objectif avec cette performance intitulée « Sous la latitude du Mémorial ACTe. Territoires. Hommage à Carlos Castillo ». Tel un anthropologue, il expérimente le rapport à l’autre en mettant en exergue le temps, le mouvement, le déplacement. La relation qu’il va instaurer avec le spectateur va devenir un élément central de l’œuvre d’art. Le corps de l’artiste devient alors instrument, vecteur d’une conversation d’un genre nouveau.
La performance qu’il propose dans le cadre des « Echos imprévus » s’articule autour d‘une déambulation entreprise au sortir d’un bateau venu accoster au quai maritime du MACTe, en direction des mats porte- drapeaux qui se trouvent au pied du Morne de la Mémoire, sur l’esplanade du Centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage à Pointe-à-Pitre.
16° 13’ 55’’N 61° 32’ 04’’O, est la localisation du lieu dit MACTe dans la performance réalisée par Audrey Phibel. Sa pertinence trouve toute son amplitude car elle réfère au-delà des positions géographiques nord-sud et est-ouest, à ce qui constitue avant tout le méridien de l’humain. Le temps d’un parcours de quelques minutes, l’artiste et ses huit performeurs nous procurent une grande liberté. Celle d’être tous ensemble les particules d’une seule et même réalisation et création qui nous situe dans ce présent partagé, à un temps T et un géo-positionnement unique dont nous serions finalement devenus les satellites.
Cette faculté de la performance à nous « ré-unir » individuellement et collectivement est au cœur du dispositif plasticien d’Audrey Phibel, dont le travail gravite autour du vivant, de ces espaces imaginaires et/ou ces espaces réels dans un univers sans aucune contrainte.
Une vidéo faisant « traces » de ce spectacle visuel qui s’est tenu le 18 novembre 2016, lors du vernissage d’« Echos imprévus » est visible dans l’exposition. Un certificat délivré et signé par l’artiste atteste que le récipiendaire a été témoin de la performance nocturne réalisée par Audrey Phibel, assisté de Ludovic Bibeyron Romane Fleury, Sony Lima, Ryan Lubert, Natty Montella, Nelson Rogier, Virginie Victor et Anissa Zapata, arborant des tee-shirts ornés des divers chiffres, lettres et ? de la position GPS du Mémorial Acte, à savoir : 16° 13’ 55’’N 61° 32’ 04’’O.
© Nathalie HAINAUT
Critique d’art